Choisir des stratégies au niveau de l’entreprise : intro

Objectifs d’apprentissage

Après avoir lu ce chapitre, vous devriez être en mesure de comprendre et de répondre aux questions suivantes :

  1. Pourquoi un examen des stratégies génériques est-il utile ?
  2. Quelles sont les quatre principales stratégies génériques ?
  3. Qu’est-ce qu’une stratégie du meilleur coût ?
  4. Qu’est-ce que cela signifie d’être « coincé au milieu » ?

La concurrence s’attaque à la cible

Pasted

Figure 5.1 : Avec l’évolution de la concurrence dans le secteur de la vente au détail, la cible sera-t-elle la flèche ou le centre de gravité ?

Le 13 janvier 2011, Target Corporation a annoncé son intention d’exploiter des magasins en dehors des États-Unis pour la première fois. Le plan prévoyait que Target pénètre au Canada en achetant les baux existants d’un détaillant canadien (Zellers), puis en ouvrant 100 à 150 magasins en 2013 et 2014 (Target, 2011). La chaîne compte déjà plus de 1 700 magasins dans quarante-neuf États. Étant donné les liens physiques et culturels étroits entre les États-Unis et le Canada, l’entrée sur le marché canadien semblait être une démarche logique pour Target.

En plus de faire son premier pas au-delà des États-Unis, Target a eu plusieurs autres sources de fierté en 2013. L’entreprise a affirmé que 96 % des consommateurs américains reconnaissaient son logo signature, dépassant ainsi les pourcentages dont bénéficient des marques célèbres comme Apple et Nike. Target s’est classée au 22e rang de la liste des entreprises les plus admirées du monde de Fortune en 2013, DiversityInc l’a placée au 20e rang de sa liste des 50 meilleures entreprises pour la diversité, et Fast Company a nommé Target au 10e rang de sa liste des 50 entreprises les plus innovantes.

Cependant, l’entrée sur le marché canadien de la vente au détail ne s’est pas déroulée aussi bien pour Target qu’elle l’avait espéré. Au début de 2014, leurs pertes d’exploitation au Canada ont atteint 1,52 milliard de dollars américains depuis l’ouverture des magasins au printemps 2013. Toujours au début de 2014, l’entreprise a brusquement congédié son président canadien et son PDG. Les ventes des magasins canadiens ont connu une énorme accélération d’une année sur l’autre, quadruplant par rapport à la même période l’année précédente pour atteindre 393 millions de dollars. Mais Target n’a ouvert qu’environ un cinquième de ses 124 magasins canadiens pendant cette période, et des plaintes ont été déposées concernant le faible niveau des stocks dans les magasins. Une violation de données extrêmement embarrassante a compromis les cartes de crédit et les informations personnelles de millions de clients et a révélé d’importantes failles de sécurité. Cela a eu un impact négatif sur les ventes. Toutefois, Target a déclaré que les revenus avaient rebondi peu après la divulgation publique (D’Innocenzio, 2014).

Des inquiétudes ont également entouré l’éventuelle vulnérabilité de Target à la concurrence au sein du secteur du commerce de détail. Le reflet le plus tangible de la position haut de gamme de Target parmi les grands détaillants est peut-être la tendance de certains clients à prononcer son nom en plaisantant comme s’il s’agissait d’une boutique française : « Tar-zhay ». En effet, une variété de concurrents semblent viser Target. Des chaînes de magasins comme Old Navy proposent des vêtements à la mode à des prix similaires à ceux de Target. Des discounters comme Winners proposent des vêtements de marque et des articles ménagers chics à des prix souvent inférieurs à ceux de Target. Les magasins de liquidation tels que Liquidation World et les magasins d’usine offrent une sélection limitée de produits électroniques, de vêtements et d’articles ménagers, mais à des prix très réduits. Tous ces magasins menacent de cibler les mêmes clients canadiens que Target essaie d’attirer.

Walmart était peut-être le concurrent le plus inquiétant de Target. Après quelques difficultés dans les années 2000, le rendement du détaillant géant était suffisamment solide pour qu’il se classe bien au-dessus de Target dans la liste des entreprises les plus admirées au monde de Fortune (onzième contre vingt-deuxième). Walmart était également beaucoup plus grand que Target. Les économies d’échelle qui en résultent permettent à Walmart de casser les prix de Target quand elle le souhaite. Un tel scénario s’était déjà produit auparavant. Il y a quelques années, la victoire de Walmart dans une guerre des prix contre Kmart a conduit ce dernier à la faillite.

Une différence importante entre Kmart et Target est que Target est considéré par les consommateurs comme offrant des produits de qualité relativement élevée. Mais cette différence pourrait ne pas suffire à protéger totalement Target. Bien que les produits de Walmart n’aient pas le même attrait chic que ceux de Target, Walmart a récemment commencé à offrir de meilleurs produits haut de gamme dans le but d’élargir sa clientèle. Si les dirigeants de Walmart choisissent d’égaler la qualité de Target tout en pratiquant des prix plus bas, Target pourrait se retrouver sans attrait unique pour les clients. Avec l’entrée de Target sur le marché canadien, la question demeure : Target maintiendra-t-elle son attrait ou son créneau unique pour les clients ou les flèches de la concurrence lancées par Walmart et d’autres forceront-elles les dirigeants de Target à trembler ?